De la simple opinion à une plus mûre réflexion, comment passe t-on de l’une à l’autre ? Avoir une opinion, c’est déjà s’avancer dans l’expression, car on ne l’a pas vraiment, nous n’en sommes pas propriétaires, on nous l’a donné et nous n’en sommes que dépositaires. A la réémettre, nous n’effectuons aucun travail personnel, elle est là, toute prête à sortir, telle qu’elle est entrée.
Tout au plus, à une circonstance donnée, nous opinons. Opiner de la tête, c’est acquiescer, sans y réfléchir, ne dit-on pas souvent opiner du bonnet, pas flatteur peut-être mais plus proche de la réalité. Réfléchir demande un certain temps, une durée nécessaire, sinon à l’irruption de l’idée, au moins à sa mise en forme avant émission. Une durée qui fait défaut dans l’opinion.
La mode est aux sondages d’opinions. On ne demande pas ce que les sondés pensent, surtout pas, même si on veut leur fait croire ensuite, aux résultats, que c’était le cas, non, on leur demande leur opinion, et, bien évidement, cette opinion pourra varier en fonction de la façon dont le sondage est organisé, puisque une opinion n’est qu’un acquiescement, ou un refus, acquiescement négatif, sans donner le temps d’une réflexion personnelle, un furtif passage par le bonnet, pas par le cerveau qui reste dessous, sans sollicitation des neurones.
Les sondages d’opinions, une absurdité ? Que non, par pour ceux qui les organisent, car, après avoir répondu sans réfléchir, le sondé – la plupart d’entre eux peut-être – se demande pourquoi il a ainsi répondu. Et se met, il n’est pas idiot quand même, à se trouver des raisons validant sa réponse, même si, avant d’être sondé il n’avait pas la moindre idée. Il ne s’aperçoit même pas qu’il s’est fait manipuler.