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2 novembre 2011 3 02 /11 /novembre /2011 05:16

            « Il suffit que l’esprit soit fortement préoccupé pour que le corps demeure sans sentiment, bien que les objets ne cessent pas d’agir sur lui. Plongé dans mes pensées je ne perçois plus ce qui m’est donné à voir, et cette distraction d’un moment supprime la sensation sans affecter le corps. » Chacun d’entre nous a maintes fois éprouvé la sensation qu’une partie de ce qu’il aurait pu ou dû voir lui a échappée, au point que l’on sourit volontiers d’entendre quelqu’un dire qu’il a « tout vu ». Et de mettre cela sur le compte de l’inattention, ou de l’attention apportée à autre chose que le spectacle considéré.

 

              Mais il est plus rare de voir des choses que les autres ne voient pas et que nous ne verrions pas nous-mêmes en une autre circonstance. De voir donc quelque chose qui n’existe pas, au sens commun. On peut certes alors penser qu’on a rêvé, ou qu’on a pris une chose pour une autre, que l’on a cru voir une chose alors que c’en était une autre, mais il est des cas, rarissimes il est vrai, où ce n’est pas permis. Des cas où l’on ne peut se résoudre à « classer l’affaire » sans autre forme de procès  que de se dire qu’on était pas « dans son état normal », l’état normal consistant à voir tout ou partie de ce qui est mais certainement pas à voir tout ou partie de ce qui n’est pas.   

 

            Ce n’est pas dans l’instant où vous voyez une chose « qui n’est pas » que vous vous interrogez, puisque, à cet instant-là, elle est, mais ensuite lorsque vous doutez, non de l’avoir vue car vous l’avez vue, mais de la possibilité de faire entrer « la chose » dans le cadre  habituel, dans une continuité acceptable. Et vous pouvez vous interroger longtemps sur la chose ainsi vécue. A supposer même que vous ne le fassiez pas, n’en reste-t-il une trace quelque part en vous ? Une trace de l’inexistant ?

 

           Mais d’où vient cette curieuse idée que si on ne peut pas tout voir ce qui existe, on ne peut pas voir ce qui n’existe pas, comme si notre vision des choses ne pourrait qu’être partielle, que si elle était parfaite, elle nous permettrait de tout voir, ce qui définirait la réalité en elle-même et que rien donc ne pourrait exister en dehors d’elle. Et que cette réalité existe donc et est à découvrir. Puisqu’elle existe, on ne peut l’inventer. Et « la chose » donc qui s’est offerte à vous n’est donc qu’une invention, hors de la réalité.

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1 novembre 2011 2 01 /11 /novembre /2011 09:22

            « Se désengager de la volition de d’interprétation qui nous est instinctuelle », l’intelligence consisterait à voir les choses telles qu’elles sont, l’instinct à les voir après interprétation, laquelle différerait d’un individu à l’autre. L’instinct créerait à chacun un monde à sa mesure, l’intelligence rechercherait derrière l’apparence la vérité de l’objet, laquelle serait unique. On ne pourrait s’accorder sur les apparences, et, pourquoi pas, la vérité serait atteinte lorsque l’on tomberait d’accord. Au plus on approfondirait l’étude d’un objet, au plus les points de vue se rapprocheraient, pour parvenir à une vision unique de l’objet ! 

 

             Revenons à la tradition qui prétendait que les animaux obéissaient aveuglément à leurs instincts et que les hommes étaient doués d’une intelligence qui faisait d’eux des êtres supérieurs par essence. Les espèces animales croyaient donc « voir des lieux, des objets, des couleurs, tout cela de manière simple et nette. Mais toutes ces choses sont perceptivement invisibles, car indissociables : on voit toujours un agencement de choses, leur rapport mobile et non des qualités aux contours fixes. »

 

            Arrive l’espèce humaine, laquelle devrait, en autres, utiliser son intelligence à dénicher derrière ce qui se voit (ou plutôt que l’on croit voir) la réalité des choses, ce qu’elles sont par elles-mêmes et non ce que l’on croit qu’elles sont.  De manière sans doute à prétendre à l’universalité.   Mais à en être encore  à la question de savoir si les animaux pensent, comment donc les doter de ces possibilités de réagir aux situations qui se présentent inopinément de manière individualisée ? Et devant lesquelles l’intelligence humaine se retrouve parfois si dépourvue ?

 

               « La conscience de ce que je perçois en tant que sujet n’a rien d’immédiat alors que la perception « brute » du sujet est ce qui m’arrive au premier plan ». La perception peut être considérée comme instantanée, tandis que la prise de conscience de cette perception demande un « certain »temps, une durée variable, fonction sans doute de la complexité de mon cerveau, donc de la richesse des interprétations possibles, de l’intérêt que j’accorde à ce type de perception avant que celle-ci ne se présente, de l’environnement dans le quel je me trouve plongé et de quantités d’autres facteurs  qui me font dire qu’à rechercher la cause – sinon exclusive au moins essentielle- d’un effet, fut-il de simple perception, me font douter du principe de causalité, pratique, indispensable même à l’esprit humain (mais ce qui peut paraître indispensable n’est pas forcément vrai) et sur lequel se bâtissent nos hypothèses, les mieux fondées comme les plus farfelues.

 

            La perception « brute » du sujet qui arrive au premier plan, .que l’on s’imagine immédiate, instantanée, semble satisfaire l’esprit rationnel qui nous anime, mais n’a rien d’un passage de rien (juste avant) à tout (juste après), avant même ce que l’on peut appeler la prise de conscience, plus tardive. . J’apprécie d’ailleurs l’emploi de « premier plan », un premier ensemble complexe qui dénote déjà une « pré-prise de conscience », qui conditionnera d’ailleurs dans certaines directions la prise de conscience qui va suivre. C’est ainsi que face à une situation donnée, qui semble surgir d’un néant, nos réactions différeront considérablement de l’un  à l’autre, car avant même de prendre conscience de ce qui se passe, tout un travail inconscient aura été fait pour parvenir à la perception « brute », une perception « brute  » variant d’un individu à l’autre et d’un moment à un  autre. Je ne parle pas de prise de conscience, mais de ce qui se passe bien avant.

 

            « S’oublier sans s’égarer, c’est là toute la difficulté », et la raison pour laquelle sans doute beaucoup ne tirent pas grand chose de leurs rencontres, de crainte  de perdre une partie d’eux-mêmes dans l’aventure. Dans leur prise de conscience, ils ne cherchent pas à découvrir l’autre et ce qu’il pourrait leur  apporter de neuf et étoffer ainsi leur  propre moi,  mais à s’enfermer dans leur vision des choses, approuvant ce qui va dans le bon sens et réprouvant ce qui n’y va pas, la moindre excentration risquant de les faire basculer, car ils sont en équilibre instable. Il  en est d’autres, en équilibre stable, qui intégrent les apports sans risquer la culbute. Mais attention à ne pas  aller  trop loin jusqu’à ne plus mesurer les risques  pris  à trop s’excentrer.     

      

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31 octobre 2011 1 31 /10 /octobre /2011 05:03

           

            Juste remarque, à mon sens, que de constater que si certaines passions ne s’éteignent pas d’elles-mêmes, c’est qu’elles sont alimentées moins par les forces d’inertie du corps que par la pensée qui continue à se  tourmenter. Sans doute que si l’on (mais que serait alors le on ?) s’interdisait de juger à leur sujet, le repos retrouverait rapidement le repos, mais penser, n’est-ce pas juger, rechercher ce qui convient et rejeter ce qui ne convient  pas ? Sinon, on tombe dans le préjugé, ce qui n’est plus penser.

 

            Juger pour soi s’entend, se « faire une idée » sur toutes choses qui nous intéressent (pourquoi nous intéressent-elles ?), ce ne signifie pas évidemment porter un jugement, le diffuser, vouloir le faire partager en prétendant que l’on a raison et les autres, ceux qui ne sont pas du même avis, ont tort, ce qui mène effectivement au dérèglement de la raison par absurde obstination, pourtant rarement ressentie comme telle.  Mais à s’interdire même de juger pour soi, ne serait-ce pas se priver de penser ? Et comment peut-on délibérément se priver de penser, pour la paix d’un esprit tombé en léthargie ?  

          

           « Et si la maîtrise n‘était qu’une passionnante et vitale illusion ? », mais la maîtrise, quelle qu’elle soit, n’est-elle pas toujours relative et, dans ce cas, même si elle peut être jugée comme réelle par celui qui affirme en disposer, peut toujours être estimée illusoire par un observateur indépendant. Quand un pouvoir  déclare qu’il a la maîtrise d’une quelconque situation, ne ferait-il pas mieux d’affirmer que la situation est sous contrôle, ce qui laisserait supposer qu’elle est maîtrisée à l’instant de sa déclaration, quitte à ce qu’elle lui échappe à l’avenir ? Il y a dans le terme « maîtrise », une domination incontestée intemporelle, mais qui donc peut affirmer que si à l’instant, il a la maîtrise de soi, il l’aura encore demain, et même l’instant d’après. Ne peut-il pas dire - se dire - plus humblement que la situation, pour l’instant, est sous contrôle ?

             Contrôler la situation,  comme contrôler ses passions, c’est se donner la satisfaction de pouvoir échapper au danger immédiat, de voir venir tout en se tenant sur gardes, car le moindre imprévu peut tout remettre en branle, c’est donc une satisfaction limitée. Alors que maîtriser la situation, comme maîtriser  ses passions, c’est se sentir assuré que, demain, plus tard, quoiqu’il arrive, on restera maître du terrain comme de soi. Sans doute, n’est-ce qu’une illusion, mais « passionnante et vitale » de trouver l’éternité dans l’extension du moment présent.   

            Mais qu’est-ce qu’une « passionnante et vitale illusion » ? N’est-ce pas d’abord une passion…une de ces passions qu’on ne songerait pas à maîtriser, mais à entretenir, ce qui, n’étant pas facile, fait dire qu’il s’agit d’une illusion, comme les résolutions d’un soir qui s’oublient le matin. Seulement cette passion-là est vitale ; ce qui fait vivre est-il une illusion, sans laquelle on ne vivrait guère ? L’illusion est une erreur, ici de l’esprit, qui fait prendre l’apparence pour la réalité, mais qu’est-ce donc que la réalité lorsqu’il s’agit d’une « erreur » de l’esprit. Une erreur des sens, on peut la qualifier par rapport à ce que ressentent les autres humains, mais une erreur de l’esprit, peut-on la qualifier par rapport au sens commun, au « bon sens » ?  

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30 octobre 2011 7 30 /10 /octobre /2011 06:28

 

             Pour ce qui est de la pratique de maîtriser ses passions, au jour le jour dirions-nous, j’irais plutôt chercher, en autres, Alain et ses propos, notamment ceux sur le bonheur, une lecture merveilleuse, un bouquin où, en quelque cent petits…propos, ne cherchons pas d’autre mot, il a dû permettre à nombre de ses lecteurs d’y puiser de précieux conseils exposés, non sous une firme doctrinale rebutante, genre recettes de cuisine, mais avec un style on ne guère plus engageant. Sa pensée, pour reprendre Larousse, se caractérise par un humanisme cartésien, c’est dire si je ne me mets pas hors sujet en le citant.

 

            Descartes, évidement, c’est autre chose, et je ne me suis jamais lassé, il y a un certain temps déjà, à passer tout un été à lire quelque quatre mille pages en trois épais volumes, présentées comme étant ses oeuvres complètes, si tant est qu’on puisse prétendre à la complétude avec un philosophe de cette qualité, mais au moins m’étais-je aventuré hors du Discours de la méthode, maintes fois lu, très souvent consulté et toujours à portée de main.

 

            Mais c’est pourtant bien une méthode qu’il s’agirait de mettre au point pour - et plutôt  par, car il ne peut s’agir que de considérations personnelles - chacun d’entre nous, une méthode en permanence à notre disposition une fois adoptée, pour répondre rapidement à toute situation imprévue. Sans doute, philosophes et penseurs de tous ordres furent-ils nombreux à se pencher sur la question, primordiale dans la recherche d‘un bonheur personnel comme d’une meilleure approche de nos semblables, des maîtres à penser qui émettaient des avis parfois contradictoires, répondant justement à des problèmes ou à des situations qui étaient les leurs, mais qui pouvaient ne pas être celles que l’on ressent soi-même. Ce qui n’échappait pas à Descartes, lequel voulut faire table rase de tous les pré-jugés.   

 

            A chacun donc sa méthode, ce qui n’empêche pas les commentaires. Pour Descartes, la dualité corps/esprit est patente. Les animaux ne sont que des machines, des rouages mécaniques, et l’homme, un animal raisonnable, n’échappe à ces mécanismes que parce qu’il possède un esprit. Le corps humain par lui-même ne peut qu’être une machine, soumis à ses passions, réactions provoquées par des sollicitations tant internes qu’externes.  Et donc aux forces d’inertie. Non l’inertie qui consisterait à rester sans réaction, insensible à tout, mais au contraire, celle qui fait continuer sur la lancée après que la cause de la perturbation a cessé  … jusqu’à ce que l’esprit, doué de  raison, ne reprenne l’affaire en main, si l’on peut dire, et maîtrise la passion, laquelle n’est plus motivée. 

 

            « Nous voulons raisonner quand nous sommes le moins capables d’entendre raison ». Notre esprit se met alors au service de nos sollicitations corporelles. Il s’emploie alors à découvrir, et il en trouve,  toutes sortes de motifs à persévérer dans cette voie. « Il serait plus judicieux d’attendre le moment où, le corps enfin apaisé, la voix de la raison aura retrouvé toute son éloquence » Mais il est des passions qui ne s’éteignent pas d’elles-mêmes, comme la haine et le désir de vengeance, le corps ne s’apaise jamais, faut-il que la raison attende ad vitam aeternam le retour de son éloquence ?

 

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29 octobre 2011 6 29 /10 /octobre /2011 07:08

             On ne maîtrise pas, c’est évident, la marche des horloges, et les faire avancer ou reculer ne nous servirait guère qu’à être davantage en désaccord avec notre environnement. Notons d’ailleurs que par des temps pas si anciens, on ne disposait pas aussi facilement qu’aujourd’hui de l’heure exacte, et qu’en des temps encore un peu plus anciens, les indications des horloges variaient suivant les lieux.  Car finalement l’heure ne peut être la même à Strasbourg qu’à Brest, avec le déplacement apparent du soleil d’est en ouest.

 

            L’heure légale, si elle nous fait perdre un contact avec la nature (alors que les Romains fonctionnaient avec douze heures de jour et douze heures de nuit de durée variable) nous a quand même permis de profiter de beaucoup plus d’avantages que d’inconvénients, à voir les problèmes que causent encore les changements d’heures suivant les fuseaux… horaires. Mais une heure à Paris, à Moscou ou à Honolulu, c’est toujours le même intervalle de temps, quelque que soit le moment dans l’année, de ce temps universel donc conventionnel, ne l’oublions jamais.  .   

 

            Seulement voilà, le nôtre de temps, celui que nous ressentons, lui, n’a rien de conventionnel. Non seulement il diffère d’une personne à l’autre, mais encore pour la même personne d’un moment à l’autre. Ce qui nécessite, pour vivre en société, un temps conventionnel auquel chacun puisse se référer. Se référer simplement pour pouvoir comparer entre elles des durées, mais pas pour autant, comme c’est devenu le cas dans nos sociétés civilisées, de l’étalon auquel tout se ramène au détriment de l’évaluation individuelle.

 

            Comme si une heure, celle de nos horloges, pouvait signifier la même chose, le même intervalle de temps vécu, par qui que ce soit,  et quand que ce soit. C’est absurde, et pourtant…ça marche bien ainsi. On est rapide ou lent à faire une certaine action, comme si ce qui importait n’était pas l’action en elle-même et le  temps mis à l’accomplir secondaire. Ramenée à l’individu et non pas à une estimation sociétale. Le temps du Un devrait primer le temps du tout, parce que le temps du Un est vécu et le temps du tout  une simple convention pour se comparer entre nous.

 

            Seulement voilà, nous sommes dans un monde de compétition et ce qui importe n’est pas par exemple pour un individu de faire mieux en mieux, la même chose en moins de temps, ou plus de choses dans le même temps, d’être de plus en plus satisfait de ses propres performances, de se surpasser, mais de faire mieux que l’autre, et si possible que tous les autres. A armes égales, pourrait-on dire dans cette lutte. Pourquoi alors ne pas tenter de tricher, comme de se doper, de se droguer par exemple, puisque seul le résultat compte. Et pourtant, « prendre son temps ce n’est pas le dilapider mais bien ressaisir tous ces instants qui nous échappent, du fait des autres ou par notre négligence. »

 

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28 octobre 2011 5 28 /10 /octobre /2011 05:17

            

             Les premières pensées sont fragiles, et il faut s’y reprendre à plusieurs fois avant de former une idée claire, solide et importante. Nul doute qu’en émettant le « Je pense, donc je suis », Descartes en était au stade de l’idée et non de la pensée fragile. La formule ne devrait-elle pas plutôt être « Je me construit des idées à partir de simples pensées, donc je me persuade que j’existe ». Car enfin, au premier stade, la pensée n’est qu’une réaction immédiate. Je pose la main sur un objet brûlant, je la retire aussitôt, « instinctivement », et j’ajoute « ça brûle », ai-je pensé ?

 

            Si par contre, après l’incident, je me promets alors de faire attention par la suite, je prends du recul, je commence à penser, à construire une idée, celle par exemple de m’équiper d’une manique…ou de laisser un autre s’aventurer à ma place. Mais si l’on estime que la pensée (comme le rire) est le propre de l’homme, c’est contradictoire avec ce que l’on observe chez l’animal qui, souvent, se débrouille aussi bien ou mieux que nous, lorsqu’il faut réagir rapidement à une sollicitation de l’environnement. Il réfléchit moins peut-être, et c’est la réflexion, le recul, qui demande du temps. Mais il réfléchit aussi, difficile d’en douter, à moins évidemment d’en négliger la compagnie. 

.    

            Ce qui différencie l’homme de l’animal (celui qu’on qualifierait d’évolué, pour ne pas mettre en doute cette supériorité à laquelle nous sommes si attachés, par peur de la perdre peut-être), c’est plutôt le fait qu’il se soit posé la question « Suis-je, est-ce que j’existe ? Comment en être certain ? » On peut croire qu’il s’agit là d’une réflexion exclusivement humaine, l’animal quel qu’il soit, n’irait pas jusque là.

 

            Mais, au fait, existe-t-il beaucoup de cerveaux humains qui aient mené une telle réflexion ? Un certain nombre sans doute, mais pas tous. Et à ne pas la mener, et à ne pas avoir eu la même réponse que Descartes, n‘en sont-ils pas moins des hommes, de la même espèce que lui ? A ne pas se demander si l‘on existe, on existe quand même.  

 

            Difficile d’isoler l’espèce humaine des espèces animales depuis que la théorie de l’évolution a submergé les vieilles idées (des idées tenaces, pas de simples pensées fragiles) de la fixité des espèces. Ce n’est pas faute d’avoir tout tenté, jusqu’au seuil infranchissable de Teilhard de Chardin - conscient que la l’homme ne tenait cette place privilégiée que grâce à la plus grande complexité de son cerveau -, le seuil de la pensée réfléchie. L’animal sait, difficile de le nier, mais seul l’homme saurait qu’il sait. Mais où commence la pensée réfléchie ? Et lorsque nous restons en deçà, lorsque nous ne faisons que penser d’une façon primaire, en simple réaction aux circonstances, que sommes-nous ? Sommes-nous ?

 

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27 octobre 2011 4 27 /10 /octobre /2011 15:43

            Qui ne s’est déjà surpris…à ne pas prêter des états d’âme aux animaux doit en être resté à la pensée pré - darwinienne, ma foi bien confortable, où les mieux pensants se croyaient issus d’une espèce à nulle autre pareille, élue entre toutes, au point d’ailleurs de rejeter dans l’animalité certains de leurs semblables qui ne semblaient pas remplir des critères qu’ils avaient eux-mêmes définis, un comble qui leur échappait d’ailleurs et qui démontrait quand même une certaine défaillance dans le raisonnement.

 

            Mais Darwin  et d’autres sont passés par là et on n’en est plus à Descartes et à ses tentatives, maladroites pour nous aujourd’hui, mais hautement méritoires pour l’époque, d’opposer aux machines animales la merveilleuse créature humaine, à part évidemment quelques anti-évolutionnistes, dont on peut saluer, pourquoi pas, la pugnacité avec laquelle ils défendent des idées largement dépassées, mais qui furent d’actualité pendant des millénaires.

 

            Pas depuis toujours évidemment, car il est probable, on peut même croire certain, que « les premiers hommes », aux prises avec les espèces animales, se soient considérés plutôt en état de faiblesse par rapport à pas mal d’entre elles, ce qui d’ailleurs les a incités à se construire un monde plus ou moins imaginaire, puisqu’ils disposaient de suffisamment de neurones pour cela…comme le font encore aujourd’hui les enfants.    

 

            Toujours est-il qu’on peut comprendre aujourd’hui pourquoi « les bêtes sont parfois nos modèles », et ne pas nous en offusquer le moins du monde. Et plutôt que de prêter aux animaux nos états d’âme, n’est-ce pas nous qui avons hérité de nos lointains ancêtres la plupart de nos réactions, que nous retrouvons plus ou moins atténuées ou renforcées, suivant leur évolution, dans les espèces animales actuelles ?  

 

            A noter que l’anthropomorphisme, selon Larousse, serait la « tendance à attribuer à la divinité les sentiments, les passions, les actes et les traits de l’homme », c’est-à-dire de pouvoir en référer à une puissance supérieure pour se sortir de situations qui le dépassaient, ne serait-ce pas plutôt de l’anthropocentrisme, « système philosophique qui considère l’homme comme le centre de l’univers et qui lui rapporte toutes choses », qu’il s’agirait présentement, car ce n’est pas de croire ou non en une divinité qui a placé l’homme au centre de l’univers, mais plutôt son complexe d’infériorité par rapport à d’autres forces de la nature qui l’a poussé à compenser cette faiblesse pour retrouver un état d’équilibre. Comme l’écrivait merveilleusement Pascal :

 

             L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature ; mais c’est un roseau pensant. Il ne faut pas que l’univers entier s’arme pour l’écraser : une vapeur, une goutte d’eau suffit pour le tuer. Mais, quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu’il sait qu’il meurt, et l’avantage que l’univers a sur lui ; l’univers n’en sait rien ».  

 

            L’univers peut-être, mais l’animal ? Un roseau pensant, dans une certaine mesure ? 

 

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26 octobre 2011 3 26 /10 /octobre /2011 06:54

 

            Que veulent dire nos rêves ? Pour ma part, je ne cherche pas à leur chercher une signification particulière dont je pourrais tirer enseignement pour ma conduite diurne, c’est dire si je suis loin d’aller rendre visite à une voyante ou à lire l’abondante littérature relative aux songes. J’oublie d’ailleurs le plus souvent, tout en étant convaincu d’avoir rêvé, sur quel sujet mes neurones ont bien pu trouver à s’occuper, encore que de temps en temps, je m’en souvienne parfaitement en me réveillant, au point de me demander si je ne continue pas à rêver. Tant sans doute je m’y sentais engagé, corps et esprit. D’être au premier réveil dans les dispositions de la fin de mon rêve, de ressentir par exemple la fatigue d’une longue marche, ou la détente d’une bonne sieste …rêvée.

 

            Je ne rêve jamais (ou alors au réveil c’est oublié) de « représentations odieuses, de mort ou de torture », mais souvent, par contre, de situations sans issue que dénoue le réveil. De marches interminables en lieux  inconnus, généralement inhospitaliers, alors qu’elles étaient prévues très courtes, de problèmes simples en apparence que je n’arrive jamais à résoudre. Et il m’arrive aussi, rarement mais pas exceptionnellement, d’avoir des rêves en série, c’est-à-dire à me retrouver plusieurs nuits de suite plongé dans la même histoire, comme cela se passe dans la vie diurne. Au point parfois de me demander si j’ai vraiment rêvé. Car enfin, à rêver ou être éveillé, c’est bien  toujours le même cerveau qui travaille. A se demander d’ailleurs, si certains, ne préfèrent pas faire de beaux rêves que songer à améliorer leur existence.  

 

            Mais revenons à mes déplacements interminables, que je mettrais des heures, parfois des jours à accomplir éveillé, comment ai-je pu les réaliser en si peu de temps dans un rêve ? Quelle peut-être la durée d’un rêve ? Existe-il un rapport entre la durée d’un rêve et le temps qu’on mettrait à le réaliser dans la vie courante ? Et si on ne se souvenait au réveil que du rêve précédant juste le réveil et pas des autres activités  du cerveau ? Un rêve sans durée significative.

 

            De Freud : « Les rêves sont des accomplissements voilés de désirs refoulés. Il est intéressant de noter à ce sujet que la croyance populaire a raison de penser que le rêve annonce toujours l’avenir. En vérité, l’avenir que nous montre le rêve n’est pas celui qui va arriver mais celui que nous aimerions voir arriver »     

 

          Ça sent peut-être un peu la diseuse de bonne aventure, mais on peut ne pas être de cet avis, pas sur le fait que le rêve n’indique pas ce qui va arriver, s’il suffisait de piquer un somme pour connaître l’avenir, ce serait sans doute formidable pour certains, mais déprimant pour d’autres, mais sur le fait qu’il indiquerait ce que nous aimerions nous voir arriver. Je ne suis pas sûr que beaucoup de rêves coïncident avec cette notion. Qu’ils traduisent ce que l’on peut avoir éprouvé en certaines occasions dans le passé, peut-être, mais prédisant l’avenir, celui que nous désirerions vivre, s’est selon.


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25 octobre 2011 2 25 /10 /octobre /2011 07:05

 

            Très longtemps, je me suis posé la question : pourquoi écrire si ce n’est que des choses banales, comment même peut-on songer à conserver la trace de pensées, de réflexions qui sont celles de tous les jours  et qui probablement trottinent dans la tête de pas mal de mes compatriotes. A lire le journal, un quotidien  par exemple, l’oeuvre donc de professionnels de l’écriture, et le trouver dépassé dès le lendemain par l’édition suivante, au point de le jeter tout naturellement, sans le moindre regret, pourquoi irais-je ajouter ma propre prose à ces tas d’articles qui perdent leur intérêt une fois lus, et encore, qui sont loin d’être tous lus !

            Bien sûr, on a chacun son petit coin plus ou moins secret, ses petites notes personnelles qui n’intéressent que soi, mais de là à écrire régulièrement des pages complètes et à les collectionner précieusement, comme si on voulait en faire cadeau à la postérité, pourquoi donc ? D’autant plus qu’à écrire, on relit, on rature, on supprime, et en finale on ne retient pas grand chose, sinon de génial, au moins de valable, qui vaille la peine d’être conservé, d’être rédigé proprement, et dactylographié pour être parfaitement lisible.

            Mais l’ordinateur est passé par là, et avec lui, non seulement la possibilité de voir ce que l’on écrit, de synchroniser la frappe sur le clavier avec le déroulement de la pensée, d’imprimer les pages une fois terminées sans y revenir pour toujours les corriger, c’est passé, ce que j’ai fait, je ne ferais peut-être pas, sans doute pas aujourd’hui, peu importe…

            Et peu à peu, à la difficulté de remplir quelques lignes au début - d’une page d’écriture manuelle sur cahier d’écolier on se retrouve ici avec un simple paragraphe -, s’est substitué une demi page puis une page complète, et deux au moins aujourd’hui, avec cette règle que, quelque soit l’inspiration ou le désir de m’y mettre, elles sortiront chaque jour, numérotées de l’imprimante. Relues parfois, mais jamais corrigées, du premier jet.

            En quinze ans, j’en arrive à la neuf millième. Quand il m’arrive, exceptionnellement, de me relire, cherchant un article sur un sujet que je me souviens quand même avoir déjà traité, je constate qu’il y a des pages qui exprimaient des pensées d’un certain intérêt, d’un intérêt certain même avec le recul du temps, au milieu d’autres qui ne répondaient qu’à une interrogation passagère.

            Mais je me permets d’estimer le bilan globalement positif, car c’est toute une évolution de la pensée qui se dessine à travers ces milliers de pages, alors qu’à ne pas les avoir écrites, je n’en serais toujours qu’à penser au présent. Et peut-être de ne pas avoir évolué, d’être toujours en attente d’un éclair de génie qui mériterait alors d’être relaté. 

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24 octobre 2011 1 24 /10 /octobre /2011 06:30

 

            Ah, la belle mécanique ! Avant le développement de l’électronique, ce n’était qu’il n’y a que quelques dizaines d’années, et spécialement lors de la dernière décennie, tout paraissait simple, ou tout au moins pouvait le paraître, pour peu qu’on avait un petit goût pour ce qui était mécanique. Lorsqu’un spécialiste, appelé en renfort lors d’une panne que l’on ne savait pas réparer soi-même, en expliquait la cause, on pouvait le suivre dans ses explications.

            Et en ce qui concerne la 2 CV, à la mécanique simplifiée à l’extrême, le moins habile des conducteurs pouvait, parfois tout au moins, s’en sortir seul. On pouvait alors plaisanter sur l’inexpérience de la femme condamnée à faire appel à un automobiliste compatissant pour la sortir d’une situation qui devenait angoissante, mais c’était avant que les notions de parité n’envahissent la vie sociale. 

            Aujourd’hui, avec l’électronique, il y a ceux qui savent et ceux qui ne savent pas, et la frontière n’est pas une question de niveau de culture, de formation initiale, d’antécédents familiaux, même pas une question d’âge, encore qu’en pourcentage les « jeunes » semblent se débrouiller mieux que les « vieux », tant pis pour la vénération que nous avons pour l’expérience acquise. Sans doute qu’un jeune cerveau assimile plus vite, que peut-être il a moins tendance à réfléchir, comme on le fait trop souvent lorsque précisément l’expérience s’accumule.

            A voir en effet des enfants manier l’ordinateur et tout ce qui va avec, alors qu’ils ne savent même pas encore lire, on se dit qu’il faut mieux partir du simple que du compliqué pour résoudre un problème d’ordre électronique. L’ennui, c’est que ce petit, pour nous expliquer ce qu’il fait, fait souvent, à nos yeux,  s’entend, de manque de pédagogie. Une impression sans doute qui nous permet d prendre nos distances car,  dans une même génération, ils se comprennent aisément entre eux.        

            Doit-on pour autant « retourner en enfance », retrouver nos réactions premières devant les problèmes qui se posent à nous, certainement pas. Que chaque génération conserve ses caractéristiques propres, et le brassage des générations entre elles produira les meilleurs effets. Car, à vouloir rivaliser avec les jeunes sur leur propre terrain, on reste toujours à la traîne, ce que ressentent cruellement ceux qui renoncent très tôt à leur propre personnalité.

            On en arrive à des vieux, de vrais vieux de quarante ans, parfois moins encore, qui par exemple, en ces temps de difficultés économiques, rejettent sur la société dans laquelle ils vivent la responsabilité de leurs déboires, et attendent d’elle la résolution de leurs propres problèmes, comme si cette société leur était étrangère alors qu’ils en sont membres. Qu’ils devraient participer au lieu de quémander sans cesse. . 

            A ce sujet, on peut d’ailleurs de se demander si ceux qui font la manche à la porte d’un magasin, d’un édifice public, d’une église au temps où les fidèles s’y pressaient, ne sont pas plus « raisonnables », ne répondent pas à des considérations plus logiques et finalement plus saines, que les autres quémandeurs. Ce sont des êtres humains qui s’adressent à d’autres humains, pour la plupart et la plupart du temps, dans une relation biunivoque, d’individu à individu, une relation donc horizontale, même si l’un est toujours demandeur et l’autre (parfois) donneur. 

            Alors que les autres quémandeurs, il y en a de toutes sortes, et de temps à autre nous y passons tous, tous ceux qui sollicitent, ou exigent (qu’ils obtiennent ou non satisfaction), s’adressent à une personnalité, une entreprise, un organisme, à l’Etat, et maintenant à l’Europe pour faire avancer un dossier, une faveur, une subvention,  pour se tirer d’une situation difficile comme pour accroître son confort. C’est-à-dire dans une relation verticale d’inférieur à supérieur, de quémandeurs à donateurs, une relation beaucoup plus ambiguë

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