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23 avril 2011 6 23 /04 /avril /2011 09:40

            On ne s’étonne pas, dans une situation donnée, de ne pas voir tout ce qui se présente, on ne peut pas tout voir, et l’on ne prête attention qu’à ce qui nous intéresse, attire notre attention. Ce qui fait qU’il peut y avoir, qu’il y a peut-être, autant de manière de regarder un tableau qu’il y a d’observateurs. Certes, on considère que certains traits ne doivent échapper à personne, tant ils sont « voyants », mais pour le reste, à chacun de trouver sa propre représentation.

 

            Mais comme il faut, quand même, qu’une certaine impression se dégage, il en est qui se chargent de guider le public dans certaines voies. Que de gens passeraient devant un tableau sans lui jeter le moindre coup d’œil et s’extasient subitement lorsqu’on en cite le réalisateur. De même, à citer un paragraphe d’un écrit, la réception pour beaucoup sera très différente s’il émane d’un inconnu ou d’un écrivain célèbre. Allez comprendre.

 

            Nous entretenons des relations diverses avec tout ce qui nous entoure, mais nous avons toujours en arrière-plan l’idée qu’il existe une réalité derrière nos impressions, que cette réalité est unique. Un objet est « tel qu’il est », on peut le trouver beau ou laid, grand ou petit, tape à l’œil ou discret, fragile ou solide, à la réflexion on se dit que ce ne sont que des impressions, des perceptions différentes de l’objet, mais que, derrière cela, il y a l’objet !

 

            C’est absurde évidemment, mais nous sommes ainsi faits. Un chien, une mouche ne voient pas le monde comme nous le voyons, mais c’est notre vue qui prime, nous sommes des êtres conscients, les seuls à l’être estimons-nous, donc ce que nous voyons des objets est ce que ces objets sont en réalité. Une réalité humaine, la réalité. Nous admettons les illusions d’optique par exemple, mais même alors, nous admettons notre erreur et pensons alors que la réalité alors n’est pas celle que nous voyons, mais qu’il y a une réalité derrière les apparences. .

 

            Une « réalité » peut-elle exister sans observateur ? L’observation crée-t-elle la réalité, ou ne fait-elle que la révéler, la faisant passer du virtuel au réel ? La réalité alors  serait plus virtuelle que réelle. Quelle est la réalité d’un hologramme, ce « cliché photographique transparent, pris par la lumière émise par un laser, qui, éclairé sous un certain angle par une source lumineuse monochromatique, restitue une image en relief de l’objet photographié » ?

 

            Pas de réalité sans observateur, cela peut faire rêver les amateurs de fin du monde matériel avec survivance de l’esprit. Plus d’observateurs, d’observations physiques s’entend, donc plus de réalité matérielle, mais qu’est-ce qu’un observateur ? Un être humain ? Plus d’êtres humains plus de réalité physique, mais pourquoi l’être humain serait-il le seul capable d’observer ?

 

            Si le rameau humain ne s’était pas détaché des branches animales, comment imaginer que notre monde ne serait que virtuel ? Considère-t-on que la naissance (réelle)de l’univers ne remonte qu’à l’arrivée du premier homme ? C’est peut-être un point de vue à rapprocher de celui de la Genèse : quelques « jours » avant ce premier homme, le premier observateur, c’était le néant. L’univers sans les êtres humains n’aurait pas de raison d’être.

 

            Et l’univers antérieur au premier homme n’aurait de réalité aujourd’hui que dans la mesure où nous, les hommes, le découvrons. Non que nous le découvrons, mais que nous transformons de virtuel en  réel. Mais alors nous ne le découvrons pas, nous l’inventons, nous le créons. Et le monde sans l’homme n’aurait pas existé ? Et les animaux alors, n’auraient-ils pas été les observateurs de ce monde privé d’hommes ? Ce ne sont quand même pas les hommes qui les ont créées, ces animaux, observateurs de leur monde. 

 

            Alors faire remonter la réalité du monde au premier animal capable de l’observer ? Mais, objecteront certains, l’animal n’a que des instincts, il n’agit pas, il subit, il ne peut donc pas créer. Comment aurait-il pu transformer du virtuel en réel ? On en revient à la pensée réfléchie qui distingue paraît-il, l’animal de l’homme. Les animaux n’auraient alors vécu que dans un monde virtuel avant l’apparition de l’homme qui alors aurait fait passer le monde et ses occupants d’alors du virtuel au réel par le seul fait de ses observations.

 

            Ce serait la prise de conscience de l’objet qui le crée, n’existerait réellement que ce dont on a conscience. Non, conscience soi-même, en tant qu’individu, mais dont un être humain, quel qu’il soit, aurait conscience. Ainsi chacun d’entre nous aurait sa propre réalité, en dehors de laquelle serait, sinon le néant, au moins le virtuel. C’est un point de vue défendable, chacun de nous en effet a une vision du monde qui résulte de ses propres observations, dans le sens le plus large du terme. 

 

            Mais alors, avec chacun d’entre nous, apparaîtrait puis disparaîtrait la réalité du monde, la conception que nous nous faisons d’un monde qui pourtant existe sans nous, puisqu’il est observé par d’autres que nous ? Mais qui sans nous n’existerait pas tel qu’il existe avec nous. Nous sommes donc chacun un élément constitutif du monde, non seulement parce que nous l’observons, mais parce que nous existons.

 

            Ceux qui n’observent pas le monde en sont quand même des éléments constitutifs dont les observateurs doivent tenir compte. Donc le monde existe sans observateur, mais à ne pas l’observer, on ne peut en affirmer la réalité. Ne peut exister que ce que l’on peut observer. Serait virtuel ce que l’on n’observe pas. Mais on peut aussi observer le virtuel, comme la flamme de la bougie vue dans un miroir. Ou dans certain cas.

 

             Il peut nous  paraître étrange de voir ce qui n’est pas pour d’autres, d’apercevoir un être ou un objet à un moment donné, et l’instant d’après devoir convenir que cet être ou cet objet ne pouvait être là, comme si, l’espace d’un moment seulement du virtuel s’était muté en réel. Mais il ne nous paraît pas étrange de ne pas avoir vu un être ou un objet qui pourtant se trouvait à portée de vue. C’est assez dire que derrière ce que nous voyons, nous imaginons une réalité existant indépendamment de notre vision. On peut ne voir qu’une fraction de cette réalité-là, mais en voir plus n’est guère admis. 

           

             Et pourtant il existe des « réalités » que certains voient et que d’autres ne voient pas, mais nous définissons par réalité ce que nous, et le commun des êtres humains avec nous, peuvent voir. Il nous faut l’assentiment, même tacite, d’autrui pour nous assurer que nous ne rêvons pas. Seuls, il arrive que nous doutions, mais dès que nous sommes plusieurs, même deux seulement, nous sommes convaincus de ne pas avoir rêver.

 

            Ainsi se construisent des opinions qui ne se partagent qu’entre un certain nombre, sans débouché universel, tant le caractère particulier apparaît aux autres. Chacun se construit sa propre réalité, sa propre conception du monde, aussi réelle pour lui que celle de son voisin, qu’un religieux ou un scientifique. Mais on donne le nom de réalité à ce qui peut être admis par le plus grand nombre. Ainsi, la création du monde, et en sept jours, était une réalité, la réalité dans le monde judéo-chrétien, mais n’avait rien d’universel puisque n’étant pas la même pour d’autres humains d’alors.

 

            Périodiquement, maintenant de plus en plus souvent, nous débarque une nouvelle scientifique qui nous fait réviser la conception admise précédemment comme universelle. Précision supplémentaire due à l’affinement de données, ce qui conforte dans l’idée que la science, l’expression de la raison humaine, approche toujours d’une  réalité ultime, bouleversement qui remet en cause ce que l’on croyait être cette réalité ? 

 

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22 avril 2011 5 22 /04 /avril /2011 11:29

            Il est courant d’entendre dire, par des gens pourtant de bonne foi, même s’ils ne sont pas toujours très convaincants quand on les pousse un peu dans leurs retranchements, que l’animal obéit aveuglément aux instincts de son espèce, tandis que l’être humain fait appel à sa raison. Les animaux seraient interchangeables, les hommes tous différents, puisque jouissant d’une certaine liberté.

 

            Avec, en conséquence, un seuil infranchissable entre les animaux quels qu’ils soient, et les hommes. Infranchissable, au moins dans un sens, un animal ne pouvant jamais être un au niveau de l’homme, tandis qu’on admet que dans certains cas, l’homme, par sa conduite, peut être ravalé au niveau de la bête. Distinction qui n’a, sans doute, pas toujours existé, au moins dans les temps préhistoriques,  mais que les religions, par la suite, ont postulé.

 

             Même Darwin et sa théorie de l’évolution n’ont pas réussi à mettre à mal ce sentiment de supériorité, étant donné la distance (en temps) à laquelle on faisait remonter  l’époque de séparation du rameau  humain. On ne descendait pas du singe, on n’était que cousins, comme si cela suffisait pour prétendre ne pas être de la même famille.

 

             Il n’y a pourtant pas longtemps, on se demandait encore si les Indiens d’Amérique étaient des hommes, sans doute se posait-on la même question plus récemment vis-à-vis des Noirs, et il en reste bien quelque chose aujourd’hui, à voir en particulier les génocides et en général tous les relents de racisme qui traînent dans certains milieux De racisme, pas de xénophobie qui est tout autre chose. On peut considérer les étrangers comme nos égaux en dignité mais en avoir peur, comme de tout ce qui est inconnu ou méconnu.

 

            Il y a quelques semaines encore, un président de région traitait les harkis de sous-hommes ce qui, même lors d’une colère où les mots ne se maîtrisent pas toujours, peuvent donner une idée de la persistance, plus ou moins consciente, du racisme dans la vie courante. Car dans le racisme, c’est celui qui s’estime supérieur à l’autre qui injurie, et la balle n’est pas toujours dans le même camp. On peut d’ailleurs s’interroger sur la signification d’un anti-racisme dont se targuent certains.

 

           Si être anti-raciste, c’est être contre le fait qu’on puisse distinguer les hommes entre eux au niveau de leur dignité, on peut le comprendre, mais si c’est être contre ceux qui sont racistes, ou estimés tels, ce qui est souvent le cas, c’est alors faire du racisme en considérant que les racistes ne sont pas dignes d’être des hommes.

 

            Mais pour en revenir à la distinction entre les hommes et les animaux, la haute idée que nous nous faisons de nous-mêmes obscurcit parfois notre raison. A nous imaginer une espèce supérieure, des surhommes en quelque sorte, ayant eux-mêmes une haute idée d’eux-mêmes, comme devraient être tous ces dieux que nous nous sommes créés, comment pourraient-ils ne pas qualifier d’instinct de l’espèce humaine cette conduite qui est la nôtre dès que nous sommes embarqués dans une foule ?

 

            Et pas seulement dans une foule compacte, style moutons de Panurge, dont on ne pourrait pas distinguer les éléments tant ils se ressemblent, mais même dans un groupe de quelques unités où disparaît totalement l’individualité humaine. Instinct de foule, instinct de groupe, faîtes disparaître le meneur, ou le mot d’ordre, que reste-t-il de l’intelligence humaine, de la pensée réfléchie qui nous distingue de l’animal ?

 

            Et l’animal, au lieu de le voir comme un élément indifférencié de son espèce, regardez-le isolément, animal sauvage dans la nature ou domestique proche de vous, en toute objectivité, difficile de le cantonner dans les instincts de son espèce, sans lui attribuer une individualité certaine.

 

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21 avril 2011 4 21 /04 /avril /2011 15:06

            L’être humain naît inachevé, pendant ses premières années son cerveau évolue, et, par la suite, lui apparaissent deux sentiments d’apparence contradictoire : il reste lui-même et c’est le monde qui l’entoure qui change, ou dans un monde qui fondamentalement ne varie guère, c’est lui qui change. Mais ces deux sentiments ne s’opposent pas, ils sont corrélatifs, en liaison permanente comme le sont des vases communicants. 

 

            Dans des périodes où l’environnement change peu, où le monde semble se stabiliser, où le petit-fils semble vivre sensiblement dans les mêmes conditions que son grand-père, c’est le jeune qui piaffe car il voudrait que cela change, il a le ressenti de son évolution personnelle, se voit  passer de l’enfance à l’adolescence, puis à l’âge adulte alors que les autres, êtres, institutions, paysages, de son point de vue, demeurent toujours ce qu’ils sont. Seul lui semble s’écouler son propre temps, celui aussi peut-être de son entourage immédiat, le reste est figé.

 

           Dans les temps de grands bouleversements, comme cela semble le cas en ces décennies, chacun semble avoir perdu, en même temps donc que ses repères, le sens de sa propre évolution. Hier, aujourd’hui, demain, quelle importance. Ce n’est plus une question d’évolution personnelle, dont on pourrait reconnaître et mesurer les étapes, par rapport à un environnement stable, mais d’un être ballotté de droite et de gauche, comme dans un torrent qu’il ne contrôlerait pas, et il en reste figé dans son for intérieur. 

 

            Mais il s’agit de vases communicants, rarement tout l’un ou tout l’autre. Et le temps passe, à des moments d’exaltation individuelle, faire bouger ce monde figé, en succèdent d’autres, de profond découragement devant l’impossibilité de la tâche et le repli sur soi, les vases communicants fonctionnent bien, ce doit être le cas d’un certain nombre.

 

            Il y a, et c’est souvent dramatique, ceux qui ne quittent pas le fond de la désespérance, les pessimistes qui noircissent tout, sans jamais voir poindre une étincelle d’espoir. Il y a aussi ceux qui jamais ne désespèrent jamais, qui, dans la nuit la plus sombre, ne quittent  pas des yeux la petite lumière qui vacille au loin. Il en est enfin qui sont indifférents à tout ce qui se passe autour d’eux, bien à l’abri dans leur tour d’ivoire.

    

            Et toute cette variété se retrouve dans le même environnement, que le monde soit stable ou subisse de grands changements. Car si certains sont très sensibles à la moindre variation dans le monde qui les entoure, d’autres amortissent ces variations et les adaptent à leur convenance. Ce n’est pas que le choc soit fondamentalement différent, mais il est amorti dans le temps. D’où apparemment un calme qu’on peut prendre pour de l’indifférence, mais qui peut-être plus profond et plus durable que chez ceux qui régissent « au quart de tour », mais passent ensuite rapidement à autre chose. 

 

            Il faut de tout pour faire un monde, et chaque individu constitue un tout en lui-même, mais il est des réactions de masse qui ne varient guère de siècle en siècle, comme si, à l’évolution individuelle des éléments qui la composent, se superposaient dans une foule des sentiments intemporels, échappant à tout contrôle raisonnable, intemporels car comparables à ceux qui devaient exister aux temps les plus reculés.

 

             Faut-il pour autant, dans ce cas, parler de retour à l’ « animalité » comme si l’évolution individuelle n’était qu’un vernis ? Non alors par rapport aux animaux que nous côtoyons aujourd’hui, mais à nos lointains ancêtres. Peut-être. Instinct de masse, étouffant les intelligences individuelles, comme chez l’animal l’instinct de masse étouffant les réactions individuelles, qui parfois peuvent être intelligentes.

 

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19 avril 2011 2 19 /04 /avril /2011 19:40

            « Quand l’eau baisse, les fourmis mangent les poissons ; quand l’eau monte, les poissons mangent les fourmis » (Proverbe thaï)

 

            Belle leçon d’équilibre de la nature, donnant alternativement l’avantage à deux espèces animales dont l’une se nourrit de l’autre, sans que ce soit toujours la même. Une alternance qu’on retrouve rarement dans nos sociétés humaines, où le fort domine le faible, lequel n’a pas beaucoup d’espoir de renverser la tendance.

 

            Ce doit être essentiellement pour cette raison qu’il a fallu inventer un au-delà où la situation s’inversait, et comme ce n’était pas évident d’y croire, que la probabilité sans être nulle n’était pas très élevée de compenser une durée limitée à quelques décennies, un siècle tout au plus, de soumission aux puissants, par une éternité, de façon à jouer toujours gagnant.

 

            Encore que le commerce des indulgences devait à une époque contrecarrer cette notion : Comment acquérir l’éternité en accumulant des durées limitées, cent jours par-ci, cinquante par- là ? Par bonheur, il existait aussi une indulgence plénière.

 

            Car pourquoi créer un au-delà si tout se passait bien ici-bas ? Mais si tout se passait bien  ici-bas, pourquoi faudrait-il le quitter alors un jour ? Pourquoi pas l’immortalité, pour les bons évidemment, car ce sont les mauvais qui empêchent les bons d’avoir une vie agréable. Mais, négligeons la perspective d’exceptions, personne n’est tout à fait bon, comme tout à fait mauvais d’ailleurs,  alors faudrait-il que les méchants vivent peu de temps et les bons très longtemps ?

 

             Mais on peut faire beaucoup de mal en peu de temps et ne pas dispenser sa bonté en permanence. Non décidément, pour en toute justice punir les méchants et récompenser les bons, les vrais pas ceux qui ne sont ni bons ni mauvais, il fallait trouver autre chose. L’enfer pour les mauvais, le paradis pour les bons, le purgatoire pour ceux qui sont ni bons ni mauvais, c’était quand même pas mal trouvé. Pourquoi donc cela ne marche-t-il plus ? i

 

            Un tien vaut mieux que tu l’auras, si ce n’était que cela, mais voilà, on veut de plus en plus avoir tout de suite quelque chose plutôt que rien, ce rien que constituent des promesses pour plus tard. Le présent, nourri des souvenirs du passé, a pris le pas sur le futur, qui ne se nourrit que d’espérance. Certains estimeront qu’il s’agit d’un retour à l’animalité.

 

             L’animal, paraît-il, est soumis aux instincts de son espèce, donc sans passé propre, ne peut envisager de futur, celui de son espèce, et ne vit donc que dans son présent propre. Car son présent, aussi anthropomorphique soit-on, on ne peut quand même lui enlever. Il vit sans arrière pensée ni projet, à se demander comment il peut vivre.

 

            C’est  donc qu’il n’a pas que son présent immédiat pour agir dans son existence. Et qui observe un animal s’en rend compte aisément. On admet donc qu’il se souvient d’un passé récent et envisage le futur proche, mais que l’homme, lui, connaît mieux son passé, en tire des conséquences pour son présent et fait des projets d’avenir.

 

             Mais on connaît beaucoup d’êtres humains (et il nous arrive aussi à chacun plus ou moins souvent) à qui l’expérience passée ne se révèle guère utile et qui renouvèlent maintes fois les mêmes erreurs, et qui ne font pas de projets d’avenir en vivant au jour le jour. Comme des bêtes, avec leur instinct ? Alors, que, dans l’échelle de l’évolution, on se place en tant qu’hommes au sommet, pourquoi pas, mais renonçons à établir un seuil,  infranchissable dans les deux sens,  entre les animaux et les hommes, par le biais de définir l’homme et l’animal sur un tel préjugé.

 

            Comment réagissaient nos lointains ancêtres, les hommes préhistoriques, qui pourtant possédaient un cerveau aussi complexe que le nôtre ? Se jugeaient-ils supérieurs aux animaux qui les environnaient, établissaient-ils une distinction fondamentale ? Certainement pas et s’ils cherchaient peut-être à se placer par rapport à eux, c’était pour se considérer comme inférieurs à certains animaux, leurs prédateurs, supérieurs à d’autres, leurs proies, et égaux à certains, ceux avec lesquels ils se battaient dans une lutte à l’issue incertaine.

 

            Un rapport de forces qui variait d’un individu à l’autre, et si une échelle existait, animaux et êtres humains s’intercalaient dans cette échelle, sans que n’apparaisse le sentiment d’un seuil quelconque entre animaux et hommes. Entre l’animalité et l’humanité, pas de distinction. Uniquement des rapports de forces.

 

            Mais les hommes, peu à peu, en se regroupant, en se protégeant, en construisant des pièges, prirent le dessus sur les animaux. Et parmi les moins audacieux d’entre eux, ceux qui, n’allant pas à la chasse, avaient davantage de temps disponible, se mirent à imaginer que les hommes, au moins ceux de leur tribu, valaient mieux, étaient plus «intelligents » que les animaux dont ils se nourrissaient. Une supériorité qui les abandonnaient en cas de danger immédiat, mais qu’ils retrouvaient le danger une fois écarté.

 

            Mais, devant la nature elle-même, et notamment face à ses soubresauts, tremblements de terre, inondations, épidémies, ils restaient totalement impuissants. Alors, de même qu’en maîtrisant les animaux (certains devenaient domestiques) ils se considéraient comme leur étant supérieurs, ils s’imaginèrent avoir leurs propres maîtres, à qui il fallait se soumettre pour mettre toutes les chances de leur côté et vivre mieux leur quotidien. Un quotidien auquel la mort mettait irrémédiablement fin. 

 

            Immortels, ils n’étaient pas, aussi imaginèrent-ils que leurs maîtres, des êtres supérieurs à eux, des dieux, l’étaient. Des dieux qu’on ne pouvait voir, mais qui, comme eux, existaient, ils devaient se trouver dans des endroits inaccessibles, et l’homme ne sachant pas voler, pourquoi pas dans les hautes montagnes ou mieux encore dans le ciel. 

 

            Mais à être inférieurs aux dieux, pourquoi ne pas prétendre les égaler, au moins en un point sensible, préoccupant, lancinant : l’immortalité. Et pour cela, leur plaire, se montrer leurs fidèles serviteurs pour mériter cette insigne faveur. Mais comment leur parler, à ces dieux invisibles, comment savoir ce qu’il fallait faire, certains d’entre eux se firent les intermédiaires.

 

            L’immortalité, légitime récompense d’une vie bien menée, ou orgueil insensé d’égaler ces êtres supérieurs qu’ils avaient imaginés pour résoudre des problèmes hors de leur portée ? S’ils avaient été créés par eux, comment auraient-ils pu prétendre à l’immortalité ? Mais c’est eux qui les avaient imaginés, alors pourquoi ne pas s’attribuer une au moins des qualités qu’ils possédaient, celle d’échapper à cette triste fin ?

 

            L’immortalité, pas de fin, ce n’est pas l’éternité, sans commencement ni fin. L’immortalité, c’est un temps long, tellement long qu’on n’en voit pas la fin. L’immortalité donc pour les humains, l’éternité pour les dieux, l’orgueil n’était pas insensé, on respectait l’écart nécessaire entre les hommes et leurs divinités.

 

            Encore qu’aujourd’hui, avec la conception relativiste du temps qui permet certaines extrapolations, il y en a qui se verraient bien se retrouver un jour éternels plutôt qu’immortels, pour rattraper sans doute le temps perdu.

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18 avril 2011 1 18 /04 /avril /2011 10:38

            Ce n’est pas la première fois que l’ordinateur tombe en panne, sans prévenir évidemment. Une fois, c’était le disque dur, cette fois-ci, c’est la carte-mère. « Vous en avez pour huit à dix jours » me dit le service après vente, en prenant une petite marge sans doute, mais au moins donc pour quelques jours, occasion (nécessité peut-être ?) de me servir d’un autre ordinateur, portable celui-là, Windows98 seulement (et non raccordé à Internet), ce qui évidemment présente quelques difficultés à passer de l’un à l’autre. 

 

            Mais le cours de la pensée doit-il s’arrêter lorsqu’un outil est défaillant ? Que n’entend-on pourtant dans bon nombre de services, administratifs notamment, « nous sommes bloqués, l’ordinateur a des problèmes ! » Bloquées pour accéder à un fichier qui y est incorporé, c’est certain, mais  pas pour cesser de faire fonctionner ses méninges, solution de facilité souvent utilisée. Il n’empêche que l’habitude une fois prise de se servir d’un ordinateur, il devient difficile de s’en passer, comme de tout bon outil d’ailleurs.

 

            Evidemment on pourrait se dire que pour quelques jours il suffirait de prendre des notes manuscrites sur les sujets qui nous viennent à l’esprit, afin de les approfondir plus tard, lorsque l’ordinateur dernier cri (sans doute ne l’est-il plus, d’une année sur l’autre le matériel évolue parfois beaucoup en cette époque où la grande vertu est de  consommer pour au moins maintenir la croissance et si possible augmenter son taux) sera à nouveau en état de fonctionner.

 

            Mais que se passe-t-il à partir de quelques notes plus ou moins succinctes, prises dans le feu de l’action ou dans celui de la réflexion ? On croyait, en les retrouvant, pouvoir se replonger dans l’état d’esprit qui était le nôtre au moment de leur rédaction, mais le temps est passé par-là, non qu’on ait oublié le sujet, c’est l’intérêt de prendre des notes, mais l’intérêt précisément s’est déplacé entre temps. Deux instants ne sont jamais identiques, ne se reproduisent jamais identiquement.    

 

            On le croit pourtant, en tentant de se  replonger dans les conditions et les circonstances d’alors, mais ce ne peut être que très incomplet. Une preuve ? Lorsque vous êtes interrompu, ne serait-ce qu’un instant, le texte que vous êtes en train de rédiger sera différent de celui que vous auriez tapé sans avoir été dérangé. Que dire alors de reprise de notes même peu de temps après leur rédaction ? Au point alors d’en supprimer un certain nombre pour manque total d’intérêt.

 

            En se demandant parfois pourquoi on a pu alors écrire cela. Dans quel but, car à griffonner quelques mots, on a toujours un but en vue, au moins celui de les retrouver plus tard présents à l’esprit, ne pas les laisser s’envoler sans espoir de retour. « Les paroles s’envolent, les écrits restent » n’est pas seulement un dicton destiné à définir la responsabilité de ses paroles et de ses actes dans la durée, mais aussi la reconnaissance qu’une idée, éventuellement très intéressante, qu’on a eue une fois peut ne jamais revenir.

 

            Une idée à soi ou bien captée, une idée en l’air comme on dit ? Se construit-on des idées, seul avec soi-même, dans la profondeur de son cerveau, n’est-ce toujours que par réaction à ce qui nous est extérieur, ou en capte-t-on l’essentiel, la quintessence, quelque chose d’universel, notre rôle se limitant, en quelque sorte, à lui donner la forme qui nous convient ? Qui nous convient, c’est-à-dire qu’à partir du même fondamental, chacun peut y trouver des implications à sa convenance du moment ou la laisser passer s’en soucier le moins du monde

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17 avril 2011 7 17 /04 /avril /2011 12:25

            Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement

            Et les mots pour le dire arrivent aisément.

            Deux vers de Boileau de l’Ar tPoétique (1674), les plus célèbres peut-être de cet auteur classique, qui ont plus de trois siècles, mais ne semblent toujours pas faire l'unanimité parmi ceux qui devraient les manier avec aisance, les étudiants de nos universités. Licence, Master, Doctorat... pourquoi notre élite de demain éprouve-t-elle tant de peine à formuler sa pensée dans une langue aussi riche que la nôtre, aussi sensible aux nuances?

             A assister à des conférences au cous desquelles ces étudiants participent, on peut être effrayé de la difficulté avec laquelle ils s'expriment pour, par exemple, poser une question à l'intervenant, lequel est souvent dans l'obligation de faire préciser ce qu'ils veulent dire, tant cela est noyé dans des phrases incompréhensibles. Tant d'années d'études pour en arriver là, qu'est-ce à dire?

            Certes, à utiliser entre eux un français dépouillé ne leur facilite pas la tâche, mais au moins pourraient-ils faire l'effort, au delà de leur cercle restreint d'initiés, de s'exprimer correctement, à moins qu'ils réfléchissent comme ils expriment entre eux, que leurs pensées s'appauvrissent en même temps que leur langage, et ne se réduisent à peu de chose, on peut encore espérer que ce n'est pas le cas.

            Mais alors, pourquoi tant d'instruction, de bourrage de crânes pour les plus assidus, si c'est pour parvenir à ne plus être capable d'exprimer clairement sa pensée?

 

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16 avril 2011 6 16 /04 /avril /2011 08:23

            On n'a pas souvent des nouvelles de la Somalie, comme d'autres régions du monde, sauf lorsqu'un membre d'une organisation occidentale se fait enlevé. Près d'un demi million de morts en une quinzaine d'années, cela fait une moyenne d'une centaine de morts violentes chaque jour. Pour reprendre l'expression malheureuse d'un président de région français, sont-ce des sous-hommes ces Somaliens, parce qu'ils ne sont pas des civilisés à la mode occidentale?

            A Valladolid, on se demandait si les indiens étaient des hommes, il y a deux siècles si les femmes avaient une âme, il y a quelques décennies qu'en enfant n était qu'un petit d'homme et pas un petit homme, il n'est peut-être pas encore entré dans l'inconscient collectif que tous les êtres humains ne constituent qu'une seule et même espèce.

            Dans l'inconscient collectif, car pour ce qui est du conscient il y en aura toujours pour penser qu'ils font partie d'une élite différente du commun des mortels, et d'autres aussi, ne l'oublions pas, pour se considérer comme d'une espèce inférieure.

            Est-ce être un sous-homme que d'être sous la tutelle d'un autre? Le propre de l'homme n'est-il pas de jouir, sinon d'une entière liberté, au moins d'un certain degré. Il faut alors distinguer la tutelle imposée de la tutelle volontaire.

            La tutelle imposée suite au constat sociétal que l'individu en question est inapte de veiller à se conduire seul, d'où la nécessité de lui attribuer un tuteur pour le guider certes mais surtout décider à sa place, quelles que soient les velléités du mis sous tutelle.

            Mais il y a aussi, et peut-être plus qu'on ne le croit, la tutelle volontaire. De ceux qui ne veulent rien décider par eux-mêmes, non par incapacité de base, mais par paresse intellectuelle, prendre le moins de responsabilités qu'il soit possible, par indécision permanente par peur de prendre une mauvaise décision, et qui veulent s'abriter derrière une tutelle protectrice, quitte alors ensuite à critiquer les actions du dit tuteur, à ne pas avoir un ou plusieurs tuteurs définis, mais à consulter autrui autant de fois qu'il est nécessaire.

            On s'étonne parfois de l'apparente docilité avec laquelle, dans des circonstances dramatiques, tels les moutons de Panurge, des individus en nombre se laissent mener par leurs bourreaux. Hors contexte évidemment, car si nous nous en étonnons, nous nous demandons en même temps ce que nous aurions fait à leur place, dans les mêmes circonstances.

            C'est le plus souvent par manque de réflexion ou par forfanterie que nous exclamons « Ah, à leur place, on ne se serait pas laisser mener ainsi! ». Car, au plus profond de nous-mêmes, nous en sommes beaucoup moins sûrs.

            Ces gens-là, ceux qui se laissent ainsi mener, pensent-ils ou ne font-ils qu'adopter, un peu par hasard, ou par paresse, les opinions des autres? Mais qu'est-ce que penser?

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15 avril 2011 5 15 /04 /avril /2011 09:30

Dans un métro bondé, on ne voit guère que le dos ou la face de la personne à côté de soi, mais lorsque l'occupation est moins dense, qu'à part les gens qui descendent à la prochaine station, tout le monde est assis, il y a presque autant de types d'occupation que d'usagers. Ceux d'abord qui, apparemment, ne font rien. Dorment ou somnolent comme si c'était le lieu idéal pour récupérer une nuit agité ou trop courte, peut-être pour tuer le temps sans en prendre conscience. Ont le regard vague, comme s'ils regardaient quelque point à l'infini, à l'horizon qui pourtant ici se trouve à quelques mètres à peine. Fixent la personne qui est en face, jusqu'à ce que celle-ci s'en aperçoive, et changent alors négligemment la direction de leur vision pour y revenir l'instant d'après. Lisent avec passion un bouquin, un polar le plus souvent comme s'ils étaient seuls au monde. Profitent desjoumaux gratuits pour s'informer des nouvelles du jour, leur réveil tardif ne les incitant pas à s'abonner à un quotidien. Révisent, ce sont des étudiants à n'en pas douter, quelques pages manuscrites, inquiets d'une interrogation prochaine. Ecrivent aussi quelques notes à la hâte car les arrêts fréquents ne rendent pas l'exercice facile. Regardent un enfant dans sa poussette et se hasardent à lui faire des risettes. Jettent un coup d'œil à leur montre, pour juger du temps qui leur restent pour arriver à l'heure au travail. Réagissent à la sonnerie de leur portable ou recherchent un correspondant pour être ailleurs ou se libérer d'une impression de claustrophobie. S'examinent avec attention grâce aux vitres, pas toujours taggées, mettent leur chevelure en ordre et rectifient leur position comme s'ils se présentaient à une importante personnalité. Et puis il y a celles qui sortent leur nécessaire de toilette et font participer le compartiment à un cours de maquillage complet, en quelques minutes seulement. Rarement les jeunes, plutôt les dames d'un certain âge qui, un peu en retard sans doute comme il se doit si quelqu'un les attend, veulent se montrer sous leur meilleur jour, surtout si en surface le soleil brille.

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14 avril 2011 4 14 /04 /avril /2011 08:28

            Il y a quelques années, on passait Tanguy à la télévision, un film récent qui reflète bien la situation d'un certain nombre de jeunes (et même de moins jeunes) aujourd'hui: à vingt-huit ans, menant une vie indépendante, mais toujours chez papa et maman, à collectionner des diplômes d'utilité parfois discutable, et dont le seul intérêt apparent était de ne pas devoir prendre la décision de se lancer dans l'existence, de quitter le nid parental.

            D'autres jeunes, eux, voudraient bien s'évader, fonder une famille, mais ne le peuvent pour des raisons financières. Au chômage, au RSA ou à la merci de petits boulots, ils continuent à vivre « aux crochets» de leur parents. Ceux-là, à défaut d'avoir pu ou voulu continuer leurs études, vont éventuellement de stages en stages de formation, sans guère d'idée directrice, mais avec le sentiment que cela ne peut pas faire de tort d'accumuler quelques connaissances supplémentaires, alors qu'on leur reproche leur manque d'expérience.

            Le tremplin vers l'emploi que représentent les études fonctionne-t-il encore, suffit-il d'aligner des diplômes pour grimper des étages dans l'ascenseur social? Le CV le plus fourni en ce domaine n'est plus guère déterminant, même si, en des temps plus faciles, il apportait un plus et influençait favorablement les employeurs. Accumuler des connaissances, c'est sans doute beaucoup mieux que de rester ignorant, mais où en est ce que l'on appelait jadis la culture générale? « Plutôt la tête bien faite plutôt que bien pleine », écrivait déjà Montaigne, et une récente « pensée du jour », de Michel Tardy, reprenait cette idée sous une forme évocatrice: « L'éducation ne consiste pas à gaver, mais à donner faim ». L'Education nationale, noyée dans ses programmes divers et variés, serait-elle capable aujourd'hui de prendre cette formule à son propre compte?

 

            « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme », c'était du Rabelais, mais qu'a-t-on fait depuis pour privilégier 1’émulation à l'érudition? Pour qu'à la fin d'un cours, comme à la fin de tous ses cours, l'élève ou l'étudiant ait envie d'en savoir plus, d'exercer son esprit critique, de s'interroger différemment sur le sujet, de l'examiner d'un autre point de we.

            Au lieu d'avoir un exposé à ne pas remettre en cause, la vérité dispensée par celui qui sait tout, le professeur, parce qu'il est le représentant de l'autorité qui conçoit les programmes, les mêmes pour tous évidemment puisqu'il s'agit ensuite de classer les enseignés en fonction des dits programmes. Et après cela, l'employeur devrait s'intéresser aux plus diplômés, aux « meilleurs », à ceux qui ont obtenu les plus hautes notes?

            Pour en faire des fonctionnaires peut-être, dans l'optique que le premier critère à prendre en compte n'est pas l'efficacité, mais la fidélité aux principes enseignés, encore que l'évolution commence à se faire sentir dans la fonction publique comme ailleurs. Mais tout le monde ne peut être fonctionnaire, serviteur donc de l'Etat et des collectivités locales, être titularisé pour pouvoir ensuite assuré d'un plan de carrière qui ne pourra que se dérouler favorablement, quoi qu'on fasse, de bien ou de mal jusqu'à un certain point.

            Pourquoi un enseignant se remettrait-il en cause en cours de carrière? On en connaît dont le cours n'a pas changé d'une génération à l'autre, qui donnent les mêmes dictées ou exercices de maths à vingt ans d'intervalle. Ils ne sont pas tous comme cela, heureusement, mais les plus dynamiques ne sont pas favorisés dans le déroulement de leur carrière, et, parfois dérangeants, sont au contraire pénalisés.

            Que n'entend-on souvent, «ce n'est tout de même pas à quelques années de la retraite que je vais innover ». Et pourtant, pendant ces « quelques» années-là, les élèves, eux, ne sont pas les mêmes d'une année sur l'autre, et un mauvais professeur peut détourner des centaines d'élèves du goût d'étudier.

            Heureusement, nous avons tous connus, espérons-le, des enseignants formidables, dont les cours étaient attendus et passionnément suivis, qui savaient communiquer leur enthousiasme, leur soif de savoir, tout autant que leurs connaissances. Pour qui « l'éducation ne consiste pas à gaver, mais à donner faim ». De quoi faire oublier les autres, ceux qui exerçaient leur profession de manière quelconque, anonyme, en attendant la retraite.

 

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13 avril 2011 3 13 /04 /avril /2011 08:51

            Vivre avec sagesse, conduire avec prudence, consommer avec modération... de quoi ne jamais se sentir seul face aux aléas de l'existence. Mais un accompagnant qui n'est pas toujours écouté, comme l'ange gardien de jadis qui nous murmuraient à l'oreille plein de recommandations, que l'on jugeait souvent un peu trop raisonnables pour être suivies à la lettre.

            Un joint, c'est pas pire qu'un verre de vin...un seul peut-être, mais le problème posé par une consommation, quelle qu'elle soit, c'est le risque d'accoutumance, de sensation de manque lorsqu'on en est privé. « Je ne saurais plus m'en passer », un aveu d'impuissance qui ne fait pas bon ménage avec la dignité humaine et la haute idée que nous nous faisons de notre humanité.

            Ainsi donc, l'homme dominerait le monde par son intelligence et la puissance de son raisonnement, mais serait à la merci des produits qu'il consommerait! Pas seulement de ceux qui contiennent des substances chimiques conçues à cet effet, mais plus généralement dés que s'installe une certaine habitude, comme si alors toutes les réactions critiques de la raison classique s'effondraient.

            Est-ce à dire que le pire ennemi, au moins le soporifique de la raison est l'habitude, contre laquelle il devient possible de raisonner mais non d'agir? Car celui qui ne sait pas se libérer d'une habitude peut très bien se rendre compte qu'il devrait raisonnablement s'en délivrer, que tout raisonnement l'y pousse et que pourtant, victime d'une accoutumance, il est incapable de concrétiser l'action qu'il élabore.

            Pourquoi en effet, lorsque l'on décide de quelque chose qui ne dépend que de nous, de se libérer d'une accoutumance par exemple, on n'y parvient pas, ou très rarement. Ne parlons même pas de substances toxiques (toujours toxiques puisque nuisant à l'exercice de la liberté de l'individu), mais d'une habitude quelconque, celle par exemple de faire certains gestes, toujours les mêmes, le matin en se levant, dans la chambre ou la salle d'eau qui nous est coutumière.

            Pourquoi toujours les mêmes, dans le même ordre alors rien ne devrait nous prédisposer à cette habitude? Que, parce que un fait extérieur vienne troubler par exemple cet ordonnancement, et tout est chamboulé, on oublie de se raser ou de se brosser les dents... N' arrive-t-il pas de se raser deux fois aussi? Ou de chercher les lunettes que pourtant nous avons sur le nez et sans lesquels la vue n'est pas très bonne?

            C'est sans doute que nous faisons beaucoup de choses machinalement - par habitude -, non que nous n'en sommes pas conscients, et nous n'en prenons conscience qu'en y réfléchissant. L'habitude, dit- on, est une seconde nature, dans l'ordre de l'acquisition sans doute, il faut effectuer une chose avant de s'y habituer, mais ensuite, dans la vie de tous les jours, ne serait-elle pas la première nature, celle qui nous vient avant l'autre, la nature réfléchie.

            Mais si, parfois, nous pouvons agir, c'est-à-dire effectuer ce que nous avons décidé après mûres réflexions,n'est-ce pas précisément parce que, par ailleurs nous laissons faire nos différentes accoutumances, libérant toute l'énergie nécessaire à la réalisation d'une seule chose. Déciderait-on d'aller où que ce soit s'il fallait se poser des questions sur la manière de mettre un pied devant l'autre?

 

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